Départ matinal du refuge, pour un objectif classique, mais qu'aucun de mes camarades n'a jamais encore gravi : la Pique Longue du Vignemale, 3298 m.
ça commence par la traversée du plateau des Oulettes, dans l'ombre et la fraîcheur. Plus on se rapproche des parois nord, plus l'ampleur de ces faces impressionne.
Nous nous élevons vers la Hourquette d'Ossoue, où le soleil nous attend. Il a été entendu qu'Alex mènerait l'essentiel de cette course, dans le cadre de son désir d'intégrer l'équipe d'encadrement en ski-alpinisme du club. Il fait donc la trace, et nous échangeons de temps en temps sur telle ou telle option.
La première descente nous amène à passer sous le refuge de Baysselance (j'ai toujours trouvé incongru l'emplacement d'un refuge aussi haut (2650 m) dans les Pyrénées), puis à passer une croupe pour changer d'orientation et de versant, et entrer dans le vallon qui mène au glacier d'Ossoue. Le passage, comme je m'y attendais, est sec, nous portons les skis. Une fois la neige retrouvée, une courte descente nous place en position plus confortable pour remettre les peaux et aborder la montée sur la glacier. Elle est longue mais régulière, Vincent et moi relayons Alex à la trace. Le bassin glaciaire du glacier d'Ossoue m'apparaît à la fois vaste et très fragile. La longueur et le niveau du glacier ont dramatiquement chuté depuis quelques dizaines d'années. Cette décrue est suivie régullièrement par l'association Moraine du glaciologue Pierre René, dont je signale l'excellent ouvrage sur les glaciers des Pyrénées, abondament illustré en photos édifiantes comparant les glaciers au début du XXe, voire au XIXe, et maintenant : le changement climatique en direct..
La "chance" de ce glacier, c'est d'être situé essentiellement au-dessus de 3000 m, et de bénéficier de chutes de neige et d'écoulements provenant des 5 pointes à plus de 3200 m qui l'entourent : Montferrat, pic de la Moscova, pic de Cerbillona, Clot de la Hount et Pique Longue, cette dernière étant la plus élevée, à 3298 m. Néanmoins, le faible enneigement de cette fin de saison laisse supposer que le bilan de masse du glacier risque encore d'être négatif en 2017..
La face sud-est, qui permet l'accès au sommet, est à mon avis aussi sèche que d'habitude en juin.. Certes, une langue de neige permet de s'élever sur plus de la moitié du parcours, mais le reste est en rochers instables. J'installe une corde fixe, à laquelle chacun va se sécuriser pour la progression, à l'aide d'un noeud machard. Grande première pour Isa, qui, lors de la revue de matériel avant le week-end, m'avait demandé "c'est quoi un machard ?".. Grande première aussi pour elle, cette ascension en crampons dans un terrain mixte neige/rocher ! Mais Isa ne se laisse pas impressionner, et elle parvient au sommet avec nous avec une joie non dissimulée !
Photos, tour d'horizon, examen de certains passages alentour (le haut de la voie des séracs au petit Vignemale, par exemple..). La vue est grandiose à 360°, nous reconnaissons chacun des grands sommets et massifs pyrénéens, depuis l'Ossau jusqu'à la lointaine Ariège !
Nous descendons, et la corde fixe démontre toute son utilité pour sécuriser le passage mixte.
Il nous reste le meilleur peut-être : la descente à skis ! Des pentes régulières, une neige décaillée et tournante, des variantes d'itinéraires infinies entre les micros reliefs, quel bonheur ! Je décide de descendre bien plus bas que l'inconfortable passage de retour vers le vallon de Baysselance, pour profiter encore de cette merveilleuse descente.
Par chance, l'endroit où nous remettons les peaux est proche d'une source, nous pouvons boire à satiété et faire le plein des gourdes. C'est que le soleil cogne fort !
Il faut donc de la constance pour cette remontée vers la Hourquette d'Ossoue, d'autant plus que la neige ramollie en surface "chasse" sous les skis si on ne met pas en oeuvre la bonne technique pour éviter ces déséquilibres épuisants. Vincent est en forme, et nous parvenons ensemble à la Hourquette, avec une vitesse de montée honorable (800 m/h dans la dernière partie), compte tenu du poids des sacs et de la chaleur..
Yann, à son arrivée, poursuit même la montée sur les pentes du petit Vignemale, lorsque je lui annonce que nous n'avons peut-être pas tout-à-fait atteint les 2000 m de D+ !
La descente de la Hourquette, en balcon au-dessus du plateau des Oulettes, est l'une des plus belles que je connaisse dans les Pyrénées, de par l'ambiance et l'environnement grandiose qui l'entourent, et de par le relief très favorable à un ski joueur, de pentes en plateaux, et de combes en goulets. On plonge enfin directement sur le refuge des Oulettes, où un repos et un repas mérités nous attendent. J'anime, après le dîner, un échange sur la neige et les avalanches avec les convives présents, à l'aide notamment de vidéos édifiantes de l'ANENA. Le public est intéressé, mais l'assistance est peu nombreuse ce week-end, sans doute du fait des élections (??).
Les photos de cette journée à la Pique Longue :