En 2007, lorsque nous avons monté ce stage avec Hélène (Verdier), nous avions pris conscience qu'en cas d'accident, de blessure, bref de "pépin" grave en montagne, chacun de nous est mal armé pour faire face. Un brevet civil de secourisme est certes utile et indispensable, mais là-haut, à 2500, en hiver, dans la neige, avec 50 km/h de vent, sans réseau GSM, on fait quoi si un membre du groupe se fait une grave entorse, ou pire, s'il y a une victime d'avalanche et qu'on la retrouve inconsciente ?
Alors nous avons réfléchi aux messages à faire passer, à la pédagogie à mettre en oeuvre pour aider chacun à mieux réagir, le jour où...
Notre volonté, c'est de mettre en oeuvre une pédagogie active, où chaque stagiaire est amené à agir. On retient 10 à 20% de ce qu'on entend, plus de 50% de ce que l'on fait. Et quand on est capable d'expliquer aux autres ce qu'on a fait, et pourquoi, c'est 80% de mémorisation.. Depuis, chaque année, nous proposons un stage comprenant 2 parties :
- une journée avec des pros du secours en montagne : Domi, médecin urgentiste montagne, en voit "des vertes et des pas mûres" tous les jours, tant en réception d'appels d'urgence qu'en intervention. Les gendarmes du PGHM, avec qui elle collabore fréquemment, c'est aussi leur métier, et on sait tout ce qu'on leur doit, et l'immense expérience qui est la leur.
Nous les mettons donc à contribution pour nous expliquer comment ils travaillent, comment ils agissent lorsqu'ils interviennent sur un secours, mais aussi ce qu'ils attendent de nous, bénévoles, en matière de message d'alerte et de conduite à tenir.
Nous mettons alors en place différents ateliers et temps d'échanges : témoignages, questionnement des stagiaires (dans les 2 sens), mises en situation (PLS, sécurisation, réanimation, façon "secourisme pour les nuls" parfois un peu éloignées de ce que disent les ouvrages, mais des pratiques qui marchent dans une pente à 30° en neige..). Le PG nous fait aussi, quand c'est possible, une démo de travail du couple chien/maître de chien sur la recherche d'une victime d'avalanche. Cette année, nous avons encore apprécié l'intervention tonique de l'adjudant-chef Cassin et de son chien Aldo ! Et un grand merci à Sébastien, GAV, qui s'est caillé pendant plus d'une heure dans un trou de neige pour nous permettre d'observer, d'écouter, et de faire (sondage, pelletage en V, dégagement de victime et mise en sécurité).
- une journée sans les pros, juste entre nous, avec nos sacs à dos "normaux" pour une course banale. skieurs de rando ou raquettistes (nous ne sommes pas sectaires..), nous partons tous pour une joyeuse randonnée.. qui tourne vite à la catastrophe : chute de pierres ou de séracs nécessitant le dégagement d'urgence d'une victime, traumatismes, mains brûlées (et oui, il n'avait pas de gants et il a glissé sur la neige dure !), luxation de l'épaule, fracture, perte de connaissance, ophtalmie des neiges, etc., et bien sûr le traitement et la sécurisation d'une victime d'avalanche.
Le groupe est mené, à tour de rôle, par un binôme de stagiaires, charge à lui de réagir lors de l'incident, d'adopter la bonne CAT (conduite à tenir), de gérer le groupe de de passer l'alerte (fictive) aux secours pros.. sachant que le portable ne passe pas toujours.. On débriefe, avec hélène, après chaque mise en situation.
Par ailleurs, on échange sur les "trucs et astuces" à mettre en oeuvre, en mobilisant ce que nous avons dans les sacs à dos, pour porter une personne qui ne peut plus marcher, faire un brancard de fortune, immobiliser un membre aussi bien que possible, faire un collier cervical de fortune, etc. Jean-Pierre nous a d'ailleurs montré une méthode pour conduire un non-voyant en terrain enneigé. Efficace, on adopte !
Cette rando calamiteuse et instructive, où on ne fait franchement pas beaucoup tourner le compteur à dénivelé (je me rattrapperai !), permet à chacun d'être tour à tour acteur, participant, observateur. En la matière, "répéter n'est pas recommencer", et on espère que le message passe..
Ce module de formation a vocation à être démultiplié dans les régions et les massifs. C'est très bien que 2 membres du CAF Clermont, par ailleurs membres de la Commission Fédérale des Sports de Neige, aient fait cette année le déplacement pour découvrir de l'intérieur ce stage dont on avait parlé en Commission. Je travaille d'ailleurs à un complément d'ingénierie de cette formation, afin qu'un instructeur, partout en France, puisse organiser une telle action, tant nous sommes persuadés de son utilité.
C'est comme le DVA : on espère ne jamais avoir à s'en servir, mais il faut se tenir prêt !
Un grand merci à nos intervenants pros donc, mais aussi à tous les stagiaires 2018, qui ont contribué, par leur participation active, au succès de ce week-end, malgré une météo très moyenne, comme il est d'usage cette saison..