Cinquième jour à Bachimana. La météo est toujours parfaite, on en profite !
En descendant le col 2838 situé au pied de l'arête sud de la Grande Fache, il y a 3 jours, j'ai admiré ce merveilleux vallon qui s'enfonce au-delà du lac de Pecico, et qui est fermé à l'ouest par un cirque dominé par la Punta Zarra. La Forqueta de Bachimana me paraît être un objectif parfait, puisque la descente se fera en face sud, au moment où les pentes auront bien "décaillé".
Ce vallon est un frigo le matin, mais la montée vers la Forqueta nous fait changer de climat et d'ambiance : c'est presque le printemps ! Autre avantage de cette Forqueta, elle donne accès facilement, équipés de crampons-piolet (+ casque, évidemment), à un petit sommet situé sur l'arête qui mène à la Punta Zarra. Le paysage y est très alpin, depuis le pic du Midi d'Ossau jusqu'à Gavarnie et au-delà.
La descente tient toutes ses promesses, plusieurs centaines de mètres de grands virages et de petites courbes, sur de la "moquette". Un régal..
Il est encore temps de profiter de ces conditions ; non pas en reskiant le même itinéraire, mais en montant à un collu situé entre la Forqueta et la Punta Zarra, sur son arête nord. Un petit col sans nom, modeste, mais qui nous permet de skier la pente est qui est aussi en excellentes conditions !
Pique-nique bien mérité, alors que ces mêmes pentes commencent à tourner à l'ombre.. Notre timing est parfait..
Descente vers le lac de Pecico, traversée (toujours un frigo !), et accès à des pentes au soleil. La journée n'est pas finie, et j'avais remarqué, le premier jour, en franchissant le port du Marcadau, cette jolie pente sud de la Muga nord. Ce n'est pas loin, un peu de continuité dans l'effort et nous y sommes.
Nous nous tenons sur la crête frontière. Vue imprenable sur le vallon du Marcadau au nord, sur tout le secteur de Bachimana au sud. Les sommets de 2900 et 3000 abondent dans ce panorama XXL..
Il est 15 heures passées, le ciel s'est un peu voilé, mais l'orientation de la pente a maintenu la neige en bonnes conditions de printemps : et encore de beaux virages ! On enchaîne avec la descente sur le lac de Bachimana, notre piste de skating préférée.. Le défi consiste, en fin de journée, avec quelques kilomètres dans les pattes et un peu de dénivelé au compteur, à traverser tout le lac enneigé en skating, sans faiblir.. pari réussi, encore une fois !
Le refuge est là pour le réconfort, et la souris d'agneau passe très bien..
Lendemain, 6ème et dernier jour. Il nous faut rentrer, mais on va tâcher de soigner le retour :
on remonte, face ouest, au col de Serrato. Laissant à main gauche les belles pentes du sommet éponyme, skiées 3 jours auparavant, on descend face est dans le "tube" déjà skié en neige de printemps. Mais comme il est tôt et que le ciel et voilé, on skie l'autre versant du "tube", et on a de la bonne neige froide ! Evident !
Une remontée de 100 mètres nous mène au fameux col de Letrero. Son franchissement ne doit pas être pris à la légère. Selon les conditions, l'avalanche ou le dévissage menacent celui qui a sous-estimé le terrain. Aujourd'hui, malgré l'exposition est, la neige est dure. Dans ces pentes à 30-35°, il faut rester concentré.. En face de nous, la plus grande paroi des Pyrénées dans son intégralité, la face ouest du Vignemale. Plus de 1500 m en développé ! En son centre court le fameux couloir de Cerbillona, un rêve de skieur-alpiniste : quel défi ! Il faut réunir beaucoup de conditions pour que sa descente à skis soit possible. Ce ne sera pas pour aujourd'hui, mais ça me fait rêver !
Le ciel laiteux, le soleil présent mais incapable de réchauffer le paysage, donnent des couleurs irréelles au vallon que nous remontons vers le col des Mulets. Nous laissonsà main gauche le col d'Arratille, qui nous ramènerait dans le vallon du Marcadau. J'ai choisi de descendre par la vallée de Gaube.
Depuis le passage des Mulets (valeureux, les bestiaux, de passer par là !), nous descendons vers le refuge des Oulettes. La face nord du Vignemale se dévoile alors peu à peu. Quelle montagne, décidément !
La bonne surprise, c'est que les contrepentes du vallon sont en "vieille poudreuse" abondante, et nous skions dans de la peuf, très concentrés, car de temps en temps, un bout de glace fait surface..
Pas d'arrêt au refuge, nous enchaînons la descente de la vallée de Gaube. Tout va bien jusqu'au moment où je choisis de rester rive gauche, pour ne pas déchausser et finir à pieds en prenant le chemin d'été. J'ai déjà suivi l'itinéraire, au printemps, et il permet de gagner beaucoup de dénivelé avant de déchausser. Mais le manque d'enneigement en-dessous de 1900 m nous rattrape : il faut chausser les crampons, mettre les skis sur le sac, et naviguer au mieux entre des micro-reliefs, en suivant parfois les traces d'un izard.. Cette itinérance, qui s'annonçait fastidieuse, se révèle merveilleuse, car nous sommes seuls, dans des endroits où jamais personne ne passe.. Nous finissons par rejoindre les rives du lac de Gaube. Des touristes, à l'autre extrémité, font "chanter "le lac en jetant des cailloux sur sa surface à peine gelée, provoquant des ondes sonores du plus bel effet..
La bonne surprise, c'est que, une fois passé le télésiège, la piste est enneigée. Nous pouvons rechausser les skis et nous laisser glisser, pratiquement jusqu'au Pont d'Espagne. La boucle est bouclée, ce jour de l'An 2020 nous aura comblés !
Le secteur de Bachimana regorge encore de nombreuses possibilités d'ascensions et des belles descentes. Je reviendrai..
Les traces : https://connect.garmin.com/modern/activity/4392092752 et https://connect.garmin.com/modern/activity/4396097594